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Mon Job, c’est conducteur pilote de convoi exceptionnel

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My Job My Truck : conducteur SPL – Frédéric Lombard

Vous allez dire que nous en parlons souvent dans le fil de Truckeditions, et vous aurez un peu raison, puisque de nouveau, nous allons évoquer indirectement la transition énergétique et cela nous convient bien 🌱🚛😊 En effet, notre valeureux conducteur du jour, Frédéric Lombard, véhicule pour les Transports Capelle, groupe leader européen du transport exceptionnel, une nacelle d’éolienne terrestre de 64 T.

Dans ce nouvel épisode de MJMT, avec le concours de notre partenaire Volvo Trucks France, nous allons traverser une partie de la Normandie pour aller jusqu’à Poix-en-Picardie, 170 km plus loin, aux alentours d’Amiens. Il nous faudra un peu plus de 4 heures pour arriver au lieu de livraison, un parc éolien en pleine réhabilitation : les éoliennes, déjà sur site depuis une quinzaine d’années, sont peu à peu remplacées par des éoliennes nouvelle génération, cela génère naturellement pas mal de convois exceptionnels. 

C’est au milieu de centaines de containers dans le port de Rouen, que nous avons rendez-vous avec Frédéric Lombard, déjà en pleine activité avec ses collègues autour de son Volvo FH 16 6X4 650 ch et du chargement du jour, une nacelle d’éolienne Vestas de 64 T que les dockers ont doucement déposée à l’aide de leur imposante grue sur la remorque Faymonville, capable de porter jusqu’à 65 T.  Le conducteur a ses habitudes sur ce quai et nous explique que le transport de matériel éolien n’a plus de secret pour son équipe et pour lui, tant ­­­­­­­l’activité entre le port et les parcs éoliens est importante. Transporter une pâle, un fût, un rotor ou encore une nacelle, ne se fait pas sans une planification précise de l’itinéraire, intégrant parfois une vitesse de 20 km/h. Dans ce reportage, il règne une certaine harmonie relationnelle et une atmosphère presque zen, nous voici dans le domaine des professionnels du transport exceptionnel où tout semble surdimensionné, avec paradoxalement des calages au centimètre près.

Pas d’élingues ici, ce sont des chaînes qui assurent l’immobilisation de la pièce, après des vérifications consciencieuses de l’ensemble, Fred mesure une dernière fois, avec sa pige télescopique la hauteur précise du convoi : 4,43 m. La longueur est de 21,50 m pour une largeur de 4 m et un poids total roulant de 103 T, tout est sous contrôle, nous pouvons décoller la charge et partir entourés des regards vigilants de Philippe et de Greg au volant de leurs voitures positionnées devant et derrière l’ensemble imposant de ce convoi de 3ème catégorie*.

Frédéric au volant de son Volvo FH 16 650 ch, en direction de la Somme : « Mon objectif était de conduire un poids lourd à 18 ans, en tant que professionnel. »

Frédéric Lombard est un professionnel de 46 ans avec la tête sur les épaules et déjà 28 ans de carrière, il ne laisse rien au hasard, et quand il parle de son métier, il évoque d’abord une passion qui s’est rapidement transformée en vocation : « Depuis tout petit, je suis attiré par les camions. À seize ans, quand l’année scolaire s’est terminée, j’ai décidé de faire un CAP-BEP en deux ans, mon but était de pouvoir conduire un poids lourd à 18 ans. À l’époque, sans cette formation et seulement avec les permis, il fallait attendre 21 ans révolus pour être chauffeur. Pour la petite histoire, j’ai eu mon CAP-BEP à 17 ans et j’ai dû attendre un mois avant de pouvoir valider mes permis et prendre enfin la route.

Cela a été comme une évidence, mon père était chauffeur, j’ai été embauché par la société où il travaillait et j’y suis resté une année. À l’époque le service militaire était obligatoire, j’ai alors dû intégrer le Régiment du train de Toul, j’y ai vraiment découvert le convoi exceptionnel puisque j’y suis devenu conducteur de porte-char de plus de 30 T pendant 10 mois. 

De retour dans ma région natale en Haute-Marne, mon patron m’a repris et j’ai continué à piloter des convois exceptionnels pour lui pendant 5 ans. Le travail manquant dans l’entreprise, j’ai choisi de changer de région pour m’installer dans les Vosges où j’ai voulu expérimenter des missions de transport plus classiques avec d’abord du camion bâché puis ensuite, pendant 7 ans, du camion frigorifique. 

Après cet intermède plus traditionnel, je suis revenu dans ma région d’origine. Mon premier patron l’a su et a voulu me réembaucher, malheureusement il n’avait plus d’activité de convoi exceptionnel et c’était vraiment le domaine dans lequel je souhaitais me perfectionner. J’ai alors postulé chez les Transports Capelle, et j’y suis depuis maintenant 3 années, curieusement le temps y passe vite, jalonné par des missions toujours différentes et intéressantes.» 

Frédéric : « le transport exceptionnel est un métier de challenge, chaque nouveau convoi est un nouveau défi, il faut aimer cogiter, c’est d’ailleurs tout ce que je recherche dans cette profession : la difficulté »

Frédéric fait un parallèle entre sa vie de sportif et son goût du dépassement de soi, qu’il retrouve dans le trekking quand il part en randonnée dans des paysages aux reliefs difficiles : « C’est toujours un challenge. C’est plus ou moins difficile mais chaque mission est particulière et personnellement, chaque fois que j’en termine une et que tout s’est bien passé : que je n’ai rien cassé, que je n’ai rien touché, je suis fier. Pour moi, chaque nouveau convoi est comme un nouveau défi, exactement comme quand je suis en montagne et que l’ascension se transforme en effort extrême, où la résistance mentale devient aussi importante que l’effort physique. Plus c’est difficile et complexe, plus j’aime cela. »

Intégrer une entreprise spécialisée est gage de missions motivantes et intéressantes pour Frédéric, c’est d’ailleurs clairement ce qu’il dit rechercher. Un chargement n’est pas toujours facile, de « gros calages » peuvent durer entre 4 et 5 heures, uniquement pour bien assurer la pièce que l’on souhaite véhiculer. Il faut être force de proposition pour trouver les bonnes solutions. Selon Frédéric, dans ce domaine, il faut être passionné et vouloir s’investir dans son job, si ce n’est pas le cas, de toute manière, on ne tient pas et surtout on ne reste pas. 

Frédéric : « Je conseille aux conducteurs routiers de venir dans ce domaine, c’est enrichissant et super intéressant. Le transport exceptionnel est un métier prenant où il ne faut pas avoir peur des montées d’adrénaline même si nous semblons tous très calmes, nous restons toujours attentifs et concentrés. »

Le convoi ne roule pas vite, les voitures** de Philippe et de Greg bloquent la circulation et ouvrent la voie à Frédéric. L’écoute et la vigilance permettent aux convoyeurs de garder en sécurité l’environnement direct de l’attelage mais parfois malgré cette grande complicité, quelques incivilités peuvent perturber le travail, si par exemple, un conducteur de voiture trop pressé veut tenter de passer en force, alors l’équipe solidaire communique via la CiBi et Frédéric, prévenu, peut freiner et se déporter autant que possible, en général cela se passe sans encombre. 

Frédéric : « Chaque convoyeur a sa spécialité, dans le groupe Capelle, certains chauffeurs sont spécialisés dans le nautique, nous sommes présents pour transporter les bateaux du Vendée Globe ou encore du Salon Nautic (Paris). D’autres convoyeurs ont leurs habitudes dans l’aéronautique, dans le spatial ou encore dans le ferroviaire, pour ma part je travaille particulièrement dans le TP et l’énergie

Pour intégrer nos équipes, il faut détenir ses permis et l’expérience technique se construit au fil des convois dans l’entreprise, plus on est aguerri, plus on convoie du “très lourd”. Un bureau d’études intégré nous permet de transporter des pièces hors-normes et d’équilibrer précisément les ensembles.

Selon leurs recommandations, je change régulièrement de remorque pour m’adapter aux différentes problématiques clients, à la charge et à la masse imposées par la nouvelle mission. Finalement, seul le réseau routier autorisant le passage de tels convois est immuable (à quelques exceptions près) et de ce fait bien connu des conducteurs de convoi. »

Frédéric Lombard devant son Volvo FH 16 650 ch
Frédéric Lombard devant son Volvo FH 16 650 ch

Frédéric : « Il faut vraiment du matériel très puissant pour assurer nos missions sur les routes et bien gérer les accès difficiles avec tant de masse et de poids à l’arrière »

« J’ai commencé ma carrière avec un Volvo F12, un tracteur lancé en 1977, c’était déjà du matériel très robuste, il fallait appuyer fort à l’époque, sur les gros leviers de commande.

 J’ai ensuite connu toutes les évolutions du FH, j’ai pu observer toutes les modifications apportées à ces véhicules au fil des années et c’est indéniable, nous arrivons actuellement à des véhicules hyper-performants avec énormément d’aides et d’assistances à la conduite et en plus de ça, beaucoup de confort. Depuis janvier 2021, je vis toute la semaine dans mon Volvo FH 16 650 ch 6X4, c’est ma « petite maison à moi ». En journée, je suis mieux que dans une voiture au volant de cette machine.

Frédéric : « Point de salut sans mon ralentisseur Hydraulique. En position 3, il freine vraiment très fort, et derrière, ça pousse ! On peut sentir une pression vers l’avant même quand le ralentisseur est sur le premier plot, la nacelle de 64 T et la remorque sont bien présentes »

« Quand il s’agit de « passer un mur » (forte montée), comme on dit dans notre jargon, ou d’entamer une longue descente, il faut anticiper et avoir de la puissance pour tirer ou retenir la charge, je reprends la main en mode manuel et je pilote les rapports pour ne pas rester bloquer. Je maintiens le rapport engagé pour éviter que le véhicule ne rétrograde et perde ainsi tout son élan (énergie cinétique). En cas d’arrêt, soit je passe en vitesse extra-lente et la montée va durer très longtemps, soit je redescends l’ensemble pour reprendre de la vitesse avant la montée effective, le travail en équipe, à ce moment-là, est vraiment vital pour bien stopper le trafic autour de la manœuvre. 

La fonction anticollision est toujours activée et m’est d’une très grande utilité, par contre la détection de lignes peut me créer des soucis si le tracteur prend la main, je la désactive donc étant souvent plus large que la voie et quasiment toujours décalé dans les courbes.

Concernant la BV, j’utilise la position Eco quand je roule à vide ou si je ne suis pas trop lourd, par contre, dès que je passe le cap des 60 à 100 T, j’enclenche le mode Performance. Le moteur monte plus dans les tours pour utiliser toute la puissance du moteur. Pour les cas extrêmes jusqu’à 130 T, il y a aussi le mode Performance +. Dans tous les cas, c’est le relief de la route qui détermine le mode que je sélectionne pour être le plus performant possible en toute sécurité. »

Entre protocole technique de chargement, préparation des demandes d’autorisations administratives, validation de l’itinéraire, planning et suivi numérique de la mission, il ne faut pas oublier l’essentiel : un convoi exceptionnel n’est pas à mettre entre toutes les mains.

Loin des lignes régulières de transport de marchandises plus traditionnelles, ces mastodontes de la route nécessitent des experts dotés d’un œil de lynx et d’un sang froid à toute épreuve.

Frédéric nous l’a démontré, lors de ce reportage, en désarmorçant chaque moment critique avec du bon sens et l’aide d’une technologie puissante, il faut être impliqué, constant et passionné pour tenir la longueur dans ce type de métier.

En outre, l’esprit d’équipe n’est pas une valeur exceptionnelle pour les personnages que nous avons eu le plaisir de rencontrer pour vous.

En tout cas, si vous avez envie de tenter l’expérience, soyez volontaire et faites-vous confiance, tout est possible quand on est habile et motivé.

Catherine Godeloup Mahé pour Truckeditions – août 2022 © – Web-série My Job My Truck Saison 2 – Ep 4

*Convoi de 3ème catégorie : au-delà de 25 m de long, de 4 m de large et au dessus de 72 T.

**Véhicule pilote et véhicule de protection arrière.

Vous souhaitez mieux connaitre les Transports Capelle, cliquez ici.

Formation requise pour le métier de conducteur routier SPL : permis C et EC (et FCOS, CACES, FIMO).

Vous souhaitez en savoir plus sur le Volvo FH 16, c’est par ici

Intervenants dans ce reportage video Truckeditions.com : Frédéric Lombard, conducteur routier SPL – Transports Capelle, Vincent Mahé – Truckeditions.

Programme My Job My Truck – Réalisation Vincent Mahé – Images additionnelles / drone Sébastien Péresse – Directrice de production Catherine Mahé Godeloup – Production exécutive Lampyris Production – Musique Motion Array – Rock Tech Logo – MA Lowtone PleasantMemories – AudioStockBox SheIsSoBeautiful MA StevenBeddall – OhThatsRealGood – MA EvgenyNazarenko – Move Towards The Goal main – Truckeditions 2022 ©

La configuration du jour, un ensemble de 9 essieux avec un poids total roulant de 103 T :

> Tracteur Volvo FH 16 6×4 650 ch avec cabine Globe-trotter.

> Remorque Faymonville de 6 essieux dont la capacité de charge est de 65 T (5 essieux directeurs et le premier fixe avec télécommande infrarouge pour influer sur l’orientation des essieux et la hauteur de la remorque via les suspensions pneumatiques, voir le fonctionnement avec Frédéric et Vincent dans le reportage video MJMT).


Retrouvez notre programme original MY JOB MY TRUCK avec Yohan Petiteau qui nous parle de son métier de conducteur routier spécialisé dans le transport exceptionnel