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De la solidarité endémique dans le transport breton

Les Rencontres de l'OTRE Bretagne 2021

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L’OTRE Bretagne a reçu tous ses adhérents et ses partenaires au stade emblématique du Roudourou à Guingamp dans les Côtes d’Armor pour la deuxième édition de ses Rencontres de l’OTRE Bretagne, tous étaient au rendez-vous après ces deux années un peu compliquées pour se revoir pendant cette journée ensoleillée organisée autour du thème de la Positive Attitude.

C’est Philippe Croizon qui a été invité pour représenter l’emblème incarnée de cette « Positive Attitude », de la résilience dont on parle beaucoup et aussi de la combativité, absolument vitale aussi dans le monde du transport.

À la rencontre de transporteurs, nous avons pu recueillir leurs histoires faites de solidarité et de volonté d’être acteurs positifs face au climat et à ses mutations.

On a beaucoup parlé du contexte COVID comme d’une fatalité, c’est plutôt vrai, mais à y regarder de plus près, ce type de catastrophe sanitaire révèle aussi, de temps à autre, des actions et des personnalités dans ce qu’elles ont de plus positif et de plus authentique…

OTRE Bretagne : des transporteurs solidaires et engagés

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Truckeditions :
« Pouvez-vous nous parler des défis que vous avez été amenés à relever dans vos métiers en pleine mutation durant ces deux dernières années ? »

Erwan Rault – Gérant des Transports Rault à Pontivy :
« Pour commencer, l’histoire de la COVID nous a quand même mis en porte-à-faux chez nos clients, plus précisément, cela s’est bien passé avec certains, par contre l’activité a baissé de manière brutale avec d’autres (vente de meubles), ce qui a impliqué des tournées où nous remontions notamment de la région Rhône-Alpes à vide.

De plus, cela a généré beaucoup de problèmes de logistiques surtout pour nos chauffeurs qui se sont retrouvés subitement sans points pour se restaurer et pour se doucher. Il a vraiment fallu que nous communiquions tous pour trouver des solutions viables pour eux en priorité qui se trouvaient en première ligne, cela a fait l’objet d’une belle mobilisation : on s’appelait, on se voyait même le dimanche avec les chauffeurs qui étaient demandeurs et super proactifs pour continuer à avancer.

La réponse commune a été d’ouvrir nos portes à certains transporteurs et à leurs chauffeurs qui ont fait de même pour nos conducteurs, des liens nouveaux se sont créés entre les transporteurs, y compris avec de grands groupes.

En même temps, il a été nécessaire de se pencher sur la problématique de l’énergie et des démarches de transition qui nous ont été demandées. Les Transports Rault sont tout d’abord passés au gaz pour finalement faire le choix du B100, nous roulons à 80 % maintenant au B100 (Colza), c’est d’ailleurs un de nos clients qui le fabrique.
Cela nous permet de circuler en ville sans polluer avec en termes de coût une équivalence avec le gazole, aujourd’hui c’est Renault Trucks qui nous permet d’avoir le Crit’Air 1 (certificat qualité de l’air) avec cette solution. Durant les Rencontres de l’OTRE, notre partenaire Volvo Trucks m’a annoncé, que ce sera également possible pour la marque d’être certifiée Crit’Air 1 dès décembre.

Pour ma part, je souhaite bientôt pouvoir passer à une autre énergie encore plus propre sans repasser par le gaz qui n’a pas ma préférence, car il génère plus de vidanges et plus de déchets d’huile selon moi, et des émissions de CH4 (méthane), ce qui n’est pas bon pour la couche d’ozone.

Chacun fait ses choix en définitive, capitaliser pour l’instant sur une solution nous évite aussi d’avoir plusieurs dispositifs à gérer et des contraintes en plus.

Concernant l’électrique, l’autonomie n’est pas encore suffisante pour être intéressante dans nos missions sans parler du coût d’acquisition des véhicules qui est trop élevé pour l’instant.

Concernant les réglementations qui ne cessent d’évoluer selon les contextes, l’OTRE nous a été d’un bon appui, nous nous sommes en effet retrouvés avec de nouvelles règlementations aussi pendant la crise sanitaire, par exemple, le droit de rouler le samedi et le dimanche en bâché, ou encore les heures supplémentaires de conduite qui ont été ajoutées puis retirées, l’OTRE était là pour nous dire ce que nous avions le droit de faire ou pas : une question était posée le soir, le lendemain matin nous avions notre réponse concrète et partagée à tous les adhérents, afin que nous puissions nous adapter très vite aux nouvelles règles. En fait, chaque sujet était partagé pour que nous puissions tous avoir une vision des événements en temps utile.

Pour conclure, les transporteurs ont été solidaires ces 2 dernières années et l’OTRE a contribué à cela également.
Les transporteurs sont concurrents et en même temps se connaissent presque tous, c’est ce qui nous donne la possibilité de trouver des solutions et de mettre des choses en place entre nous concrètement. Ce qu’il faut aussi comprendre, c’est que durant cette période les chauffeurs ont été mis en avant certes, mais en réalité, cela a été très difficile sur les routes, ils ont vraiment beaucoup souffert les premières semaines, le temps que tout se mette en route.

Ensuite via l’OTRE, on a pu signaler en temps réel, les endroits où les douches étaient mises en place, et où il était possible de se restaurer, ça a été vraiment un moment de solidarité, la COVID n’a pas fait que du mal dans ce sens, il nous a permis de retisser des liens dans toute la France, c’est du moins ce que j’en retire et c’est plutôt positif. »

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Truckeditions :
“Pour faire perdurer votre activité, quels ont été vos objectifs ses 2 dernières années ?”

Vincent Bobet, Responsable chez A.V.B situé à Theix-Noyalo : 
“Tout d’abord, contrairement à nos collègues du transport de marchandises, nous intervenons dans l’activité de transport de voyageurs en autocars et en minicars (de 9 à 63 places) dans la région de Vannes, notre domaine d’activité regroupe de la ligne régulière, des voyages touristiques, du tourisme réceptif, du tourisme d’affaires et des déplacements sportifs.

En 2019, tout était en ligne dans notre entreprise, nous étions au maximum de nos capacités, 2020 s’annonçait plus que très bien, mais il en a été autrement, la crise sanitaire immobilisant ainsi tous les véhicules de tourisme de mars 2020 jusqu’à une timide reprise fin juin 2021.

Garder notre personnel a été notre priorité

Nous avons passé un an et demi à gérer notre perte d’activité sur ce segment important de notre activité (tourisme), comme beaucoup d’entreprises, nous avons eu des aides de l’état (chômage partiel), qui nous ont donné la possibilité de garder nos salariés, en outre nous avons eu la chance de garder une activité régulière grâce à la Région et à la ligne BreizhGO, nous avons donc continué à faire tourner nos effectifs afin de garder notre personnel de manière à être prêt au moment de la reprise effective.

Le 1er septembre 2021, nous avons enfin senti le rebond et nous sommes repartis avec tous nos effectifs, c’était ça notre grande problématique.
Pendant la crise sanitaire, les échanges avec l’OTRE ont été très constructifs, avec la mise en place de plans d’actions, l’OTRE nous a été d’autant plus utile que nous n’avions aucune connaissance de ce type de contexte, et nous ne savions pas comment nous allions faire.

Des discussions avec le ministère du transport ont résulté la mise en place de plans de sauvegarde pour éviter que nos PME ne périclitent. La branche voyageur de l’OTRE Bzh augmente d’année en année, l’objectif est d’être plus visible en tant que PME du transport de voyageurs.

« Objectif zéro émission » comme mantra sur la route

Dans notre domaine d’activité, les enjeux environnementaux sont pris au sérieux et l’on voit évoluer les mentalités de semaine en semaine, la prise de décision en est tout autant impactée, à notre mesure, nous y répondons avec la volonté de proposer à nos clients des énergies alternatives.

Pour commencer et c’est une chance, nous sommes situés en plein cœur du parc régional naturel du Golf du Morbihan, à Theix-Noyalo près de Vannes, c’est donc pour nous une évidence de s’impliquer.
En 2018, nous avons fait l’acquisition de notre premier autocar 100 % électrique (dédié à des services touristiques, type transfert gare), et en 2019 et nous avons acheté notre second véhicule 100 % électrique qui est affecté à une ligne régulière pour le compte de la région, aujourd’hui nous avons passé le cap des 300 000 km en 100 % électrique avec nos deux véhicules.
En outre, nous avons continué notre démarche en instaurant une politique de renouvellement de notre flotte vers des véhicules Euro 6-c et Euro 6-d. Aussi, nous avons fait équiper notre dépôt de panneaux photovoltaïques, pour produire nous-mêmes notre propre énergie et après une année d’exploitation, je peux vous affirmer que nous produisons plus d’électricité que ce que l’on consomme, et par conséquent nos deux véhicules sont autonomes.
Nous avons aussi optimisé notre consommation d’eau en travaillant sur les méthodes de lavage de nos engins, il reste important que nos véhicules soient toujours propres, nous avons donc choisi la phytoépuration (filtration des eaux usées par les plantes ici en circuit fermé sur le site de l’entreprise, avec récupération des eaux de pluie).

L’OTRE au-delà des échanges qu’elle nous permet et de l’appui que la fédération nous délivre, nous a donné l’opportunité de connaître le programme Objectif CO2, les transporteurs s’engagent, porté par l’Ademe.

Sur la base du volontariat, nous avons commencé à collecter nos chiffres dans un premier temps, pour nous rendre compte qu’ils étaient plutôt satisfaisants et nous avons obtenu finalement le label au mois de septembre dernier. Cela a impliqué, comme le label l’exige, la mise en place de programmes d’amélioration dans l’objectif de toujours faire baisser notre bilan carbone, cette année cela s’est matérialisé par des formations à l’écoconduite, avec un conducteur formateur en interne, et après quasiment 4 mois de formation, on observe déjà sur certains véhicules 2 litres de différence par rapport à la consommation étalon de départ, c’est vraiment intéressant et ça nous motive pour continuer dans ce sens, nous, PME du transport de voyageurs.”

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Truckeditions :
« Pouvez-vous nous parler des problématiques que votre métier, le transport d’animaux vivants, a dû relever ces 2 dernières années ? »

David Gourlaouen des Transports David Gourlaouen de Loudéac :
« Je gère effectivement une entreprise de transport d’animaux vivants à Loudéac, ce métier est en pleine mutation et il y a des problèmes importants à résoudre tant au niveau sanitaire qu’au niveau du recrutement, il faut savoir qu’actuellement, il reste compliqué de garder les chauffeurs, les contraintes sanitaires étant importantes et très contraignantes pour beaucoup dans ce métier particulier.

Entre autres, la mise en place de la formation en amont est difficile à résoudre, les conducteurs étant à temps complet quasi seul dans leur activité quotidienne, il y a très peu d’aide dans ce métier et les contrôles sont présents à tous les niveaux.

En Bretagne, il y a beaucoup d’élevages de porcs et ces dernières années, il est apparu une nouvelle maladie jusqu’alors inconnue, qui s’appelle la PPA (la peste porcine africaine), qui a décimé beaucoup d’animaux.
Dans ce contexte, il y avait un vrai problème de lavage des camions et de mon côté, j’ai essayé de trouver une solution à cette problématique sanitaire dans un premier temps en construisant une station de lavage adaptée sur mon site de Loudéac, positionné au centre de la Bretagne, il est d’un accès facile quel que soit l’endroit où l’on a livré en Bretagne.
L’investissement a été important (350 000 euros) mais il a permis d’avoir une station de lavage ouverte à tous et performante.

De la solidarité pour plus d’autonomie

Auparavant les transporteurs étaient tributaires des abattoirs qui mettaient à disposition ou pas, leurs stations de lavage privées, clairement ceux qui ne travaillaient pas avec eux, ne pouvaient pas en bénéficier, avec l’arrivée fortuite de la PPA, c’était inacceptable.

Nous étions, par exemple, souvent confrontés le vendredi à ce souci, avec nos camions que nous ne pouvions pas laver, donc, le lundi matin nous retournions dans les élevages fatalement avec des camions sales.

Il était évident que cela ne pouvait pas durer compte tenu des contraintes sanitaires à respecter drastiquement, nous avons donc construit cette station pour nous et pour nos collègues afin de limiter les risques de propagation de maladies.

L’idée importante était en même temps aussi de sauvegarder les emplois de la profession, si des élevages étaient contraints de fermer, nous étions tous en difficulté, c’est de la solidarité et c’est du bon sens pour nous tous.

Dorénavant, nous sommes plus sereins, on sait que nos camions seront toujours propres sans dépendre de personne et en plus, la station étant ouverte à tous, les équipements sont plus performants, le coût d’investissement étant ainsi plus vite amorti.

L’OTRE a été un grand plus pour nous, auparavant nous étions plus divisés, chaque transporteur travaillait pour son compte et l’OTRE nous a fédéré, nous avons tous pu nous rassembler pour œuvrer notamment sur des points qui étaient injustes.

En ce moment, nous travaillons pour la modification ensemble d’une loi concernant la transportabilité des animaux et c’est un vrai plus, seul, cela n’aurait bien entendu pas été possible.
Dans le même esprit de mutualisation, l’Otre nous fait gagner du temps avec son panel de partenaires, il est en fait, plus simple de trouver les professionnels dont on a besoin à un instant T. »

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Finalement Philippe Croizon nous le démontre avec sa devise comme étendard, le fameux « tout est possible » mène à bien des solutions dans lesquelles le groupe est souvent plébiscité. 

Les transporteurs le savent puisqu’ils osent avancer sans cesse, un peu comme Philippe Croizon dans son parcours de vie : il a osé aller vers les autres, parce qu’il était dans le besoin, après s’être libéré de sa peur de demander un coup de main.

Demander de l’aide est négatif et avilissant, c’est du moins souvent ce que nous retenons de notre éducation, or c’est plutôt l’inverse, c’est un moment constructif de partage, une sorte de prise de pouvoir sur soi-même.

« Positive attitude » et proactivité continuent à rassembler tous ces transporteurs qui sont en pleine dynamique.

Puisque, ne l’oublions pas, le transport reste un métier d’avenir aux multiples possibilités pour de nouveaux arrivants curieux et… Positifs.

CGM pour Truckeditions – nov 2021

Intervenants dans ce reportage video Truckeditions OTRE 2021 : Magguy Henaff, Secrétaire Générale OTRE Bzh – Bruno Théaud, Président OTRE Bzh – Vincent Bobet, Responsable chez A.V.B. – Erwan Rault, Gérant des Transports Rault – David Gourlaouen, Gérant des Transports Gourlaouen – Philippe Croizon, Conférencier Optimiste “Tout est Possible”, Chroniqueur, Auteur, Aventurier et Acteur.

Réalisation Vincent Mahé – Digital Manager Catherine Mahé Godeloup – Production exécutive Lampyris Productions – Musique Motion Array – MA Biofunky – DanceInTheSand – Main Logo tech real – Truckeditions 2021 ©

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